Le gouvernement canadien vient de dévoiler, le 24 novembre, la Stratégie nationale d’adaptation du Canada, laquelle vise à bâtir des collectivités résilientes et une économie forte. Les assureurs canadiens saluent la publication du document de consultation. 

Le lancement de la Stratégie a eu lieu à l’Île-du-Prince-Édouard, où le passage récent de l’ouragan Fiona a causé des dommages importants. Le ministre de la Protection civile, Bill Blair, et la ministre des Langues officielles et responsable de l’Agence de promotion économique du Canada atlantique, Ginette Petitpas, étaient présents au nom du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbault

La Stratégie est accompagnée d’un plan d’action de 70 mesures fédérales réparties entre 22 ministères et organismes. Le gouvernement canadien prend des engagements supplémentaires d’une valeur de 1,6 milliard de dollars (G$) pour contribuer à protéger les collectivités d’un océan à l’autre.

En ajoutant les autres programmes existants en matière d’adaptation, de résilience aux catastrophes et des interventions en cas de sinistres majeurs, les engagements fédéraux dépassent les 8 G$. Les nouveaux fonds sont axés vers cinq domaines prioritaires : 

  • améliorer la santé et le bien-être ;
  • bâtir et entretenir des infrastructures publiques résilientes ;
  • protéger et restaurer la nature et la biodiversité ;
  • soutenir l’économie et les travailleurs ;
  • réduire les effets des catastrophes climatiques.
Zones inondables 

Le document de 61 pages, en incluant les annexes qui résument les indicateurs de réussite de la stratégie, est maintenant l’objet d’un dernier sprint de consultation de 90 jours.

Le financement déjà annoncé servira à approvisionner le Fonds municipal vert et le Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes (FAAC) de même que pour élaborer des outils et des services de données pour aider les Canadiens, les collectivités et les experts à mieux évaluer les impacts des changements climatiques. 

Parallèlement au lancement fait à l’Île-du-Prince-Édouard, le ministre des Ressources naturelles du Canada, Jonathan Wilkinson, était présent à North Vancouver, en Colombie-Britannique, pour mettre en évidence le financement accordé à trois programmes fédéraux qui font partie du plan d’action sur l’adaptation et qui relèvent de son ministère. 

Le premier est le programme d’identification et de cartographie des aléas d’inondation pour améliorer la cartographie des inondations. On pourra ainsi mieux transmettre l’information accessible sur les risques d’inondation aux collectivités concernées. 

Le deuxième programme est une nouveauté et cible les deux de forêt. On créera notamment un centre d’excellence pour l’innovation et la résilience en matière de feux de végétation.

Le troisième programme vise la résilience des collectivités côtières et nordiques. Les projets pilotes feront appel aux partenaires côtiers, aux détenteurs de droits autochtones et aux intervenants pour combler les principales lacunes en matière de connaissances sur l’élévation du niveau de la mer, l’érosion côtière, le dégel du pergélisol et des glaciers. 

Le premier but 

La résilience aux catastrophes est l’une des principales actions d’adaptation prévues dans la stratégie. Le premier but mentionné dans la section sur la résilience aux catastrophes se lit ainsi :

« Les collectivités et toutes les personnes vivant au Canada sont mieux préparées à prévenir et à atténuer les dangers et les conséquences des catastrophes liées au climat, à y réagir et à s’en remettre. Le bien-être et les moyens de subsistance des personnes vivant au Canada sont mieux protégés. Les risques globaux de catastrophe ont été réduits, en particulier pour les secteurs, les régions et les populations vulnérables les plus exposés. » 

Cinq objectifs sont reliés à ce but, et le premier est la réduction mesurable du nombre de personnes au Canada touchées par les dangers liés au climat. On y réfère précisément aux impacts des feux de forêt, des canicules et des inondations dues aux précipitations extrêmes. 

Réaction des assureurs 

Selon Craig Stewart, vice-président, changements climatiques et affaires fédérales au Bureau d’assurance du Canada (BAC), « cette première stratégie nationale d’adaptation est courageuse et ambitieuse. Aucun autre pays ne s’est ainsi doté d’un plan aussi détaillé en cibles d’adaptation », dit-il.

Le BAC félicite les ministres Blair, Guilbeault et Wilkinson et leurs équipes pour cet accomplissement. Selon M. Stewart, les éléments proposés dans la stratégie, particulièrement les objectifs et les résultats précis en matière de mitigation des risques, « sont critiques pour la résilience du pays et la sécurité des Canadiens ». 

« Le gant est jeté. Le gouvernement fédéral montre le leadership nécessaire et il espère avec justesse que nous allons tous monter au front pour l’aider à cibler les priorités et les actions à prendre », ajoute M. Stewart. 

« Les investissements proposés dans la stratégie seront une mise de fonds pour réaliser les actions dont nous avons besoin pour atteindre les objectifs », insiste Craig Stewart. 

Depuis 15 ans, les réclamations relevant des sinistres climatiques ont plus que quadruplé, rappelle le communiqué du BAC. Entre 1983 et 2008, les assureurs versaient en moyenne des indemnités de 422 millions de dollars (M$) par année en raison des sinistres naturels. La moyenne normale des dommages assurés est devenue 2 G$, la majeure partie découlant des inondations.

« Il est temps d’agir et nous sommes fiers de constater que la stratégie nationale d’adaptation est un appel à l’action », conclut le BAC. 

Municipalités 

À l’Union des municipalités du Québec (UMQ), le président de l’UMQ et maire de Gaspé, Daniel Côté, se réjouit notamment de la reconnaissance par le gouvernement fédéral de l’impact des changements climatiques sur les infrastructures municipales. 

« Les municipalités et leurs populations sont les premières à vivre les conséquences des événements climatiques extrêmes, qui demeurent plusieurs mois et années après l’incident », indique M. Côté par voie de communiqué. 

L’injection de 530 M$ dans le Fonds municipal vert, qui a été créé par la Fédération canadienne des municipalités (FCM) est saluée, tout comme les 489,1 M$ prévus dans le FAAC. Mais ces sommes seront insuffisantes pour répondre aux besoins des municipalités, selon l’UMQ. 

L’Union dévoilait en septembre dernier une étude réalisée par WSP et Ouranos concernant les impacts des changements climatiques sur les finances municipales. On estimait alors qu’il en coûterait plus de 2 G$ par an aux municipalités du Québec, et ce, jusqu’en 2055, seulement pour adapter leurs infrastructures et les rendre plus résilientes.

La coalition 

La coalition Climate Proof Canada (Un Canada résistant au climat) a aussi réagi favorablement au dévoilement de la Stratégie par voie de communiqué. Cette coalition réunit une quinzaine d’entreprises et associations de l’industrie de l’assurance, la FCM, des associations du secteur industriel et des groupes environnementaux. 

Taneen Rudyk, présidente de la FCM, rappelle qu’il est « urgent de hausser nos efforts pour mieux comprendre et mitiger les risques climatiques ». Elle salue particulièrement les investissements annoncés dans le Fonds municipal vert. Mme Rudyk constate que les recommandations de la Fédération et de Climate Proof Canada ont été entendues et trouvent leur place dans la Stratégie. 

Selon Blair Feltmate, du Centre Intact d’adaptation au climat de l’université de Waterloo, le document de consultation « peint un tableau réaliste des nouveaux défis qui découlent des changements climatiques ». Il ajoute que « la Stratégie offre une plateforme concrète au Canada pour se préparer et limiter les impacts des extrêmes climatiques ». 

De son côté, Conrad Sauvé, président de la Croix-Rouge du Canada, rappelle que son organisation peut constater les effets dévastateurs des catastrophes naturelles sur les familles et les collectivités au pays. « Se remettre d’un désastre prend du temps et peut s’avérer plus coûteux et complexe que prévu », dit-il.